Dans la région Nouvelle-Aquitaine, 34,5% des cigarettes consommées sont issues du marché parallèle. Ce taux a augmenté de 1,1 point entre les seconds trimestres 2021 et 2022.
Presque tout ce qui se vend légalement est copiable. Et copié. La preuve : le nombre des cigarettes consommées en France et ne provenant pas du réseau des buralistes est passé à 32,7% au second trimestre 2022, selon l’étude Empty Pack Survey.
Ainsi, le tabac n’échappe pas à la contrefaçon. La consommation de cigarettes contrefaites connait depuis le confinement une véritable explosion, en particulier en région bordelaise où la part des achats transfrontaliers augmente aussi continuellement entre le second trimestre 2020, le second trimestre 2021 et le second trimestre 2022.
Résultat, à date, une cigarette sur 4 consommées dans la région Nouvelle-Aquitaine a été achetée en dehors des frontières françaises. Des résultats qui proviennent d’une étude réalisée par Seita, filiale du Groupe Imperial Brands et second acteur du marché français de la cigarette.
Des réseaux bien ficelés
« Nous avons réalisé plusieurs enquêtes dans 126 villes de France et ces enquêtes sont menées dans les mêmes villes les 2e et 4e trimestres de chaque année de façon à avoir une radiographie sur le profil de ce que consomment les gens dans chacune de ces villes. Bien entendu, pour avoir des résultats fiables, il faut faire tous les quartiers de la ville, nord/sud, est/ouest, et ceci de manière répété pour avoir les tendances », explique Hervé Natali, Responsable des Relations territoriales Seita .
Suite à ces études réalisées sur l’ensemble du territoire français par la Société nationale d’exploitation industrielle des tabacs et allumettes, les experts se sont rendus compte d’une tendance. Les Français se fournissent de moins en moins chez le buraliste pour consommer leur cigarette.
Pourtant, toujours d’après la Seita, la contrefaçon baisse sensiblement mais toutes les villes ne sont pas égale face à ce phénomène. Au global, la contrefaçon baisse dans la région (-6,5 points entre le 2ème trimestre 2021 et le 2ème trimestre 2022, pour un taux de 9,8% en 2022) après être resté à un très haut niveau entre 2020 et 2021.
Cependant, certaines villes sont toujours très impactées par la contrefaçon : Bordeaux : 22,5% de contrefaçon au second trimestre 2022, Bayonne : 26,3% de contrefaçon au second trimestre 2022, Anglet : 30,1% de contrefaçon au second trimestre 2022
L’exemple de ces trois villes est assez révélateur. Quand on est à Anglet ou Bayonne, on a une majorité de gens qui vont acheter leurs cigarettes à la frontière espagnole. Même dans ces villes-là, il y a des cigarettes de contrefaçon qui sont proposées à la vente par des épiceries de nuit, par le bouche à oreille et ils viennent même concurrencer les prix espagnols. Et on voit que ça remonte jusqu’à Bordeaux, et même en Bretagne », ajoute Hervé Natali.
Un phénomène amplifié par les derniers confinements. Les trafiquants de tabacs – qui vendent des cigarettes de contrefaçon – sont venus au plus près des consommateurs en leur proposant des cigarettes deux fois moins chères par rapport au buraliste et cela a générer un phénomène d’amplification de la contrefaçon.
Les cigarettes de contrefaçon sont en général fabriquées dans des usines clandestines. Il y a 3 pays malheureusement à la pointe sur ce sujet : la Pologne (numéro 1), la Belgique (plaque tournante puisque située proche de La France mais également du Royaume-Uni) et l’Espagne. D’ailleurs, on démantèle régulièrement des usines de contrefaçon dans ces pays.
Conséquence : même si les saisies, les interpellations et les condamnations se succèdent depuis quelques années dans notre région, les forces de l’ordre n’arrivent pas à enrayer l’explosion de la consommation de tabac contrefait à cause de leur provenance.
Changement de stratégie
Toutefois, la situation semble progressivement évoluée depuis quelques semaines d’après Hervé Natali. Les trafiquants changent de stratégie et se rapprochent de leurs clients.
En France, on était extrêmement étonné pendant des années de ne pas en découvrir une seule. Il y en a une qui a été découverte fin 2021 et une seconde la semaine dernière dans la région parisienne. Cela veut dire que les trafiquants viennent au plus près des marchés à forte fiscalité et fabriquent sur place à tour de bras. »
Très clairement, les trafiquants ont changé d’échelle et de modèle. Le trafic est devenu très organisé, les usines clandestines se sont implantées dans les pays limitrophes de la France, ou même sur le territoire national.
S’ajoute à cela un système de distribution hyper organisé et très présent sur tous les réseaux sociaux.
Encore récemment, il y avait un réseau de trafiquants d’Europe de l’Est qui s’était implanté sur toute la façade atlantique jusqu’à Montpellier. Ils louaient des tas de garages dans lequel ils entreposaient des cigarettes, et après ils les vendaient dans les villes ou ils avaient des garages », raconte le responsable des relations territoriales de la Seita.
Alors, comment faire face à ce commerce illicite ? Difficile de trouver une réponse. En attendant, Hervé Natali se questionne sur les décisions prises par le gouvernement : « Quand plus d’une cigarette sur 3 ne provient pas du réseau des buralistes, on peut se poser la question : augmenter les taxes fait-il sortir les fumeurs du tabac ? »
Les chiffres du commerce transfrontalier et de la contrefaçon semblent répondre par la négative. Quand les cigarettes sont trop chères, les consommateurs se tournent vers d’autres sources d’achat, légales ou non. Et cette tendance n’est pas nouvelle.
La France s’est dirigée vers une politique de fiscalité très élevée sur les paquets de cigarette. Certes, c’est un choix, en revanche, pour les consommateurs, il a fallu faire leur propre choix. Soit arrêter de fumer, soit continuer, mais à un prix moins cher. Typiquement, il y a des Français qui fument des cigarettes espagnoles, belges, luxembourgeoises, allemandes, italiennes. Pourquoi ? Paracerque ce sont des pays moins fiscalisé où les paquets de cigarettes sont moins chers », précise Hervé Natali.
En tout cas, si les décisions prises sont souvent contestées par les fumeurs, la vente parallèle représente un manque à gagner annuel de 10 à 15 millions d’euros pour les buralistes
[the_ad id= »2951″]