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Interview. Charente-Maritime. Que se passe t’il au Centre Hospitalier de Saintonge ?

Dans une interview accordée à AunisTV, le secrétaire général de la CGT des Hospitaliers Saintais, Stéphane Mazureau, a voulu alerter les Charentais-Maritimes sur les différentes problématiques qui fragilisent le système de santé notamment au sein de l’Hôpital public.

La CGT des Hospitaliers dénonce une pénurie de plus en plus importante de soignants au Centre Hospitalier de Saintonge. (©Ludovic Sarrazin)

Épidémies de Covid-19, de grippe, manque de personnel… Les services d’urgences vont mal, et l’Hôpital en paie les conséquences partout en France notamment les soignants du Centre Hospitalier de Saintonge qui sont à bout de souffle d’après le secrétaire général de la CGT des Hospitaliers Saintais.

Vendredi 22 avril, Stéphane Mazureau a dressé un nouveau bilan de la situation dans un communiqué. Il décrypte les maux que traverse sa profession depuis de trop nombreuses années. Interview.

AunisTV. Pouvez-vous me décrire la situation ?

Stéphane Mazureau. On rencontre énormément de problèmes en ce moment. Le personnel hospitalier, et de santé en général, sont épuisés, du coup, on se retrouve face à une pénurie du personnel. Nous avons aussi des indisponibilités pour congés maternité. Conséquence : on a moins en moins de personnel, certains démissionnent et cela résulte par un épuisement du personnel qui tombe malade et est donc obligé de prendre un arrêt maladie.

Il y en a même qui reviennent sur leur repos. Cela crée une dégradation du soin, les résidants sont moins bien lavés, moins bien soignés et donc ça génère autant de la maltraitance pour le personnel que pour les résidents qui sont en souffrance.

Vous avez des chiffres ? 

SM. Oui. Par exemple, au Centre Hospitalier de Saintonge, il manque six infirmières sur quatorze et neuf aides-soignantes sur trente-huit. Cela dure depuis deux ans et le phénomène ne cesse de se dégrader. Le 22 avril, jour où nous avons décidé de publier notre communiqué, on comptait 1 infirmier pour 80 résidents dont 30 avaient contracté le virus du Covid-19.

Le personnel est en épuisement total, mais cette problématique est générale. Cela se passe sur toute la France. Sans parler du manque de médecin… Il manque 110 personnels sur le centre hospitalier. Certains sont obligés de travailler sur leur jour de repos, travail 4 ou 5 week-ends d’affilés et ont des problèmes pour poser leur congé par manque de personnel. En plus, la direction voulait imposer des journées de 15 heures. C’est une véritable catastrophe !

Il y a aussi des difficultés dans le recrutement…

SM. Au Centre Hospitalier de Saintonge, on a la plateforme HUBLO qui est de l’intérim interne, ouvert aussi à l’intérim externe. En externe, on ne trouve plus personne. En interne, on empile les intérims, mais ils commencent à être aussi à bout de souffle. Il va falloir que l’état se réveille quand même, car on sait qu’ils veulent privatiser tout le système de soin public, mais le problème, c’est qu’on va à la catastrophe. De plus, concrètement, le dernier Ségur de la santé n’a pas changé grand-chose. D’ailleurs, la CGT a voté contre puisqu’il prône la casse sociale et elle est entrain de se traduire…

La CGT a-t-elle des solutions ?

SM. Il faudrait supprimer la tarification à l’activité (T2A). Je vous rappelle que ce mode de financement consiste à faire fonctionner les hôpitaux comme des entreprises privées. On souhaite également la suppression des mutuelles qui ont été mises en place pour privatiser le soin et bien sûr mettre les moyens qu’il faut au niveau des hôpitaux pour continuer à faire vivre l’hôpital public et revenir au système d’il y a 40 ans.

Vous avez eu une réponse des directions des établissements de santé ? 

SM. On n’a pas eu de retour de l’ARS suite au communiqué, mais ils nous disent que cela vient de la direction générale des Établissements de Santé qui est au-dessus de l’ARS puisqu’elle émane directement du gouvernement. Ils disent qu’il n’y a pas de finances, mais en fait, c’est faux ! C’est une volonté de l’état de supprimer le système de soin public et ils vont y arriver.

Dès l’année prochaine, ils vont faire rentrer les mutuelles privées dans l’offre pour les agents du public. Résultat, on se dirige progressivement vers la privatisation de notre système de santé. En plus, on commence à transférer des lits sur le privé pour tout ce qui rapporte (hospitalisations, chirurgie, etc.). Autrement dit, on enlève ce qui rapporte à l’hôpital pour casser l’offre publique de soin. On commence aussi à ouvrir de plus en plus des urgences dans les petites cliniques, et on ferme les urgences dans les grands hôpitaux… Il faut chercher l’erreur !

Aujourd’hui, vous en voulez au gouvernement ? 

SM. Ce système a été mis en place depuis déjà une bonne vingtaine d’années. Cela a démarré tout doucement, mais on savait que ça allait monter en pression. Mais le plus impressionnant, c’est que depuis toutes ces années, on a monté des mouvements de grève pour dénoncer ces problématiques, on l’a toujours dénoncé au niveau national, mais le sujet a toujours été étouffé par le gouvernement. En même temps, il ne va pas scier la branche sur laquelle il est assis !

Vous avez encore l’espoir d’un changement ? Une prise de conscience ?

SM. Cette problématique est montée en puissance et la crise sanitaire a bien évidemment accéléré le processus. Maintenant, il faut se rendre à l’évidence, on est dedans et la situation est grave partout en France. Quand vous voyez que des établissements comme celui de La Rochelle,qui est le premier centre hospitalier de Charente-Maritime, sont obligés de fermer son service d’urgence en journée, on est en droit de s’interroger. C’est grave et il n’y a aucune logique !

À Strasbourg, par exemple, il y a une personne qui est décédée en attendant aux urgences. Des cas comme celui-là, vous en avez partout… Allez regarder sur le Facebook du Collectif Santé en danger, vous allez voir que les gros hôpitaux en France ferment leurs urgences, leur service de chirurgie, des blocs opératoires… Tous les services un peu partout ferment à tour de bras.


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