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Après la reprise du chantier à Sainte-Soline, les anti-bassines se préparent à un nouveau rassemblement

Après une semaine d’arrêt, mardi dernier, le chantier de la réserve de substitution de Sainte-Soline a repris en sud Deux-Sèvres. Les manifestants anti-bassines sont prêts à remettre le couvert .

Les anti-bassines se préparent de nouveau à manifester à Sainte-Soline. (©LudovicSarrazin)

Suspendu le 1er novembre après la manifestation des anti-bassines pour apaiser les esprits, le chantier a repris mardi dernier. Tracteurs et pelleteuses creusent de nouveau la terre, mais cette fois-ci sous haute protection.

Sur place, près d’une dizaine d’escadrons de gendarmerie encadre la reprise du chantier très contesté de cette réserve de substitution qui continue de diviser agriculteurs, écologistes et autres défenseurs de la nature.

Pour autant, selon les agriculteurs, « la semaine d’interruption des travaux n’aura pas d’incidence sur le calendrier du chantier », qui prévoit une mise en service de la réserve au printemps 2024.

Une bonne nouvelle pour les porteurs de ce projet qui doivent se préparer une nouvelle fois à retour sur site des manifestants dans les prochaines semaines d’après le collectif  « Bassines Non Merci ! ».

« Ça va bouger dès la semaine prochaine ! »

La trêve des hostilités aura été de courte durée dans les Deux-Sèvres. Dix jours après la manifestation anti-bassines à Sainte-Soline, le chantier reprend et les manifestants sont prêts à remettre le couvert pour faire entendre leur indignation.

L’annonce de la signature du protocole pour la Vienne semble d’ailleurs avoir relancé les hostilités puisque le préfet du département a officialisé le 3 novembre la signature du protocole autorisant la création de 30 retenues d’eau dans le bassin du Clain, soit 8,8 millions de mètres cubes pour 153 exploitants.

Pour Julien Leguet, porte-parole du collectif Bassines Non Merci !, « cette signature donne des réponses assez claires sur les intentions de l’État. »

Néanmoins, on va s’en tenir au fait qu’en début de semaine prochaine, nous allons organiser une conférence de presse pendant laquelle on va donner plus d’éléments concernant la suite des événements », annonce l’enfant du Marais poitevin.

De leur côté, les agriculteurs de la Coop de l’eau restent positifs concernant l’avancée du chantier dans leur dernier communique, contrairement aux anti-bassines, satisfaits de l’action coup de poing menée par des milliers de manifestants rassemblés pour protester contre ces projets « néfastes ».

On a cette vraie satisfaction d’avoir réussi à bloquer le chantier pendant 7 jours ouvrables. La course contre la montre pour la Coop de l’eau va donc être compliquée à tenir puisqu’ils ont jusqu’au 31 décembre pour finir la phase de travaux de cratère et de reprofilage des sols pour ensuite plancher sur la plastification du site à partir de début janvier », explique Julien Leguet.

Toutefois, aujourd’hui, si aucun manifestant ne se trouve encore sur place, cette parcelle devrait continuer de servir de « point d’appui » aux manifestants anti-bassines qui souhaitent s’inscrire dans une stratégie de « grande mobilité ».

Dès le début de la semaine prochaine, le collectif annoncera certainement relancer le mouvement contestataire à Sainte-Soline. Une conférence de presse devrait surement être organisée dans les prochains jours.

En attendant, le 28 novembre, ils seront nombreux à soutenir « leurs 5 camarades » en jugement au tribunal de Niort suite à ce week-end de mobilisation du 29 octobre et 30 octobre.

« Pas de stratégie d’enlisement »

« Cette parcelle est un point d’appui, on reviendra ici tant qu’il le faudra, mais on n’est pas du tout dans une stratégie d’enlisement, mais plutôt sur une stratégie de grande mobilité parce qu’en effet les bassines se multiplient sur le territoire. »

Remplies de détermination, les anti-bassines n’ont pas encore dit leur dernier mot. Et pas seulement sur le projet de Sainte-Soline : « Il y a une bassine à Mauzé-sur-le-Mignon sur laquelle on va tout faire pour qu’elle ne se remplisse pas. »

D’après Julien Leguet, la nappe phréatique serait actuellement à 80 cm en dessous du niveau de remplissage dans cette commune des Deux-Sèvres. Une situation critique qui illustrerait bien la problématique de l’usage de l’eau dans certains départements.

Sur la question, une ZAD pourrait-elle être construite à Sainte-Soline ? Les anti-bassines ne seraient pas dans cette optique..

Sur les éléments sémantiques, une ZAD, c’est une zone à défendre, donc la zone à défendre, c’est bien le Marais Poitevin et ses bassins versants. On a donc une stratégie liée à cette zone à défendre », souligne le porte-parole.

Ainsi, Bassines Non Merci veut rester mobile et ne souhaite pas s’implanter sur un chantier au vu de leur multiplication en Charente-Maritime comme en Deux-Sèvres. « C’est nous qui allons assiéger les bassines et ce n’est pas nous qui allons nous fixer quelque part pour se laisser assiéger par l’état. »

La « bassine » de Sainte-Soline, surnom donné par les opposants, est la deuxième des seize réserves de plusieurs centaines de milliers de mètres cubes qui doivent voir le jour dans ce département, une première ayant été mise en service.

Une politique de l’autruche ?

Au niveau des échanges avec le gouvernement, les anti-bassines les jugent nuls. « Nous n’avons aucun contact, les seuls contacts sont par médias interposés, et pour l’instant tout ce qu’on reçoit c’est de la violence et du mépris. Le ministre Darmanin ose prétendre que nos propos sont mensongers, c’est insupportable ! »

Lors du rassemblement du 29 octobre, certains opposants avaient forcé les grilles du chantier, avant d’être repoussés par les forces de l’ordre déployées sur le site, débouchant sur des violences et des hospitalisations dans les deux camps.

Depuis, la hache de guerre n’est pas enterrée. Le ministre de l’Intérieur ayant même surnommé les manifestants : écoterroriste ». Une expression que la députée de LFI de Seine-Saint-Denis, Clémentine Autain, n’a pas appréciée et a qualifiée « d’insulte ».

Je pense qu’il confond éco terrorisme et éco tourisme. J’ai surtout vu des citoyens qui venaient de l’autre bout de la France pour prendre conscience de l’enjeu. Aujourd’hui, il y a bien un environnement qui est terrorisé et il est terrorisé par le gouvernement de Macron et leur choix politique. Macron n’a pas compris l’extrême urgence et le péril écologique dans lequel on se situe » Julien Leguet.

Actuellement, la mobilisation contre le projet de construction d’une mégabassine dans les Deux-Sèvres pose également une question fondamentale : la radicalité, chez les écologistes, va-t-elle devenir la nouvelle norme ?

Pour le moment, il est difficile de pouvoir pointer du doigt leurs actions même si certaines dérives et violences orchestrées par une minorité portent à confusion le message. Conséquence, l’État ne souhaite pas discuter.

Il n’est pas du tout à l’écoute de nos revendications. Mais, oui, l’environnement est terrorisé, oui, la biodiversité est saccagée, oui, il y a une vraie violence qui est faite aux paysans en leur imposant de tels projets des contrats qui leur imposent eux-mêmes d’utiliser des pesticides massivement donc celui qui terrorise et mène notre biodiversité et nos territoires à la perte en menant une véritable terreur, c’est bien le gouvernement », ajoute le défenseur de l’environnement.

Contrairement à une idée répandue, ces lacs artificiels de plusieurs hectares ne se remplissent pas – ou alors de façon très marginale – grâce aux précipitations. Ils sont alimentés par des pompages effectués entre début novembre et fin mars.

Une pratique qui indigne les écologistes et suscite une forte opposition à  ces projets devenus les nouveaux symboles de la course vers le bas entre un modèle d’agriculture intensive et non durable qui cherche à survivre et les effets de plus en plus rudes d’un réchauffement climatique inexorable.

Suite à la reprise du chantier, l’équipe d’AunisTV a tenté de contacter les représentants de la Coop de l’eau pour connaître leur avis sur cette situation complexe. Sans succès.


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