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La Grève-sur-Mignon : un agriculteur poursuivi pour mise en danger de la vie de militants Anti-bassines

Quentin, agriculteur à la Grève-sur-Mignon, est accusé d’avoir mis en danger la vie de militants et de journalistes lors d’un rassemblement Anti-bassines le 25 juillet 2019.

Les militants anti-bassines devant le tribunal judiciaire de La Rochelle. (©Y. Picard)
Les militants anti-bassines devant le tribunal judiciaire de La Rochelle. (©Y. Picard)

L’affaire avait fait grand bruit le 25 juillet 2019 à La Grève-sur-Mignon. Ce jour-là, le collectif « Bassines non merci !« , avait organisé une action de contrôle des exploitations céréalières pompant de l’eau d’irrigation dans la nappe phréatique, suivi d’une conférence de presse.

Alors que le convoi de militants et de journalistes composé d’une dizaine de voitures se déplaçait sur une petite route communale, sa rencontre à deux reprises avec l’attelage agricole de 18 tonnes conduit par Quentin, précédent un second piloté par son frère mineur, n’a pas été sans émotion.

Depuis plusieurs années, l’ambiance est électrique entre le monde agricole céréalier portant des projets de bassines (réserve d’eau artificielle d’irrigation N.D.L.R), et des ardents défenseurs du Marais poitevin ligués en collectif.

Intimidation ?

Alors dans ce contexte-là, Quentin roulait-il trop vite pour intimider et provoquer les antis-bassine et les journalistes ? C’est la question que s’est posée le tribunal judiciaire de La Rochelle ce mercredi 13 janvier.

À noter que pour cette affaire un second temps judiciaire aura lieu. Il se déroulera devant le tribunal des enfants qui aura à juger le frère de Quentin dont la fourche de l’engin qu’il conduisait avait traversé de part en part un véhicule de la presse locale.

La défense du prévenu a insisté à de nombreuses reprises sur le fait que ces deux dossiers étaient différents.

Même si le contexte était le même, le client de Me François-Frédéric Andouard était prévenu d’une mise en danger d’autrui et de conduite d’un véhicule à une vitesse excessive. « J’ai croisé une file de voiture. Je n’étais pas au courant de ce rassemblement », explique Quentin.

Pour l’agriculteur. « Je roulais à 25 ou 30 km/h ». Par contre, le presque trentenaire dément avoir vu les gendarmes qui fermaient le convoi lui avoir fait des appels de phares. « Ils m’ont juste regardé ».

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Un coup de volant vers le convoi de véhicules

Plusieurs témoins dont les gendarmes, expliqueront dans leurs dépositions, avoir vu une roue de la remorque mordre le fossé, obligeant Quentin à donner un coup de volant vers le convoi de véhicules.

Le prévenu est formel. « Si j’étais tombé dans le fossé, j’y serai encore ! ». Un des journalistes présents sur place décrira une scène normale.

Puis dans un second temps, Quentin et son frère feront demi-tour et recroiseront le convoi à l’arrêt cette fois-ci. « J’avais oublié de compter un tas de ballots que je venais de presser ». C’est à ce moment-là que la fourche de l’engin piloté par son frère percutera un véhicule. Quentin, lui, ne sera pas témoin de la scène.

Les 2 engins sont passés à 10 cm des véhicules. J’avais le sentiment d’une situation très dangereuse. La première alerte a été ce virage pris à grande vitesse. Après il y a eu cette seconde charge. Là j’étais très inquiet. Notre combat est un combat d’idées. Nous sommes très respectueux de la partie adverse ».
Julien Le Guet. Militant de « Bassines non merci ! ».

La partie civile parle d’un sentiment de survie et d’être passé à deux doigts de la catastrophe. Pour chacun des 15 clients qu’il défend, Me Nathanaël  Ormillien du barreau de Niort, demande la somme de 500 euros de préjudice plus 400 euros de frais de procédure. Soit un total de 13 500 à la charge de l’agriculteur.

Le ministère public en préambule de ses réquisitions rappelle avec insistance. « Ce n’est pas le procès du frère ! ».

Suspension du permis de conduire

Selon le parquet. « Il aurait dû s’arrêter. Les autres avaient le droit d’être là autant que lui ». Une suspension de 8 mois du permis de conduire est requise, ainsi qu’une amende 300 euros à l’encontre de Quentin, dont le casier est vierge.

La défense parle d’une, « très curieuse affaire. Le collectif n’est pas si pacifiste que ça. Une plainte a été déposée contre lui pour la coupure d’une vanne d’eau qui a entraîné l’annulation d’une récolte ». « C’est un procès en sorcellerie. Si ce n’est pas toi c’est donc ton frère.  Tu es agriculteur, donc tu as une tête d’irriguant ! », martèle une dernière fois Me François-Frédéric Andouard.

Avant de plaider la relaxe pour son client. « La mise en danger n’est pas démontrée. Ils viennent battre monnaie ».

Le tribunal a mis sa décision en délibéré au 10 février prochain.


Par Yannick Picard.

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